mercredi 24 novembre 2010

Onfray, pour l'amour d'une apostille

De Michel Onfray vaut-il encore la peine de parler ? En un siècle où l'indifférence, au mieux, la haine, au pire, pour le sens et pour la philosophie - digne de ce nom, et bien loin des vieille recettes pour cesser d'être gentil, pour être vrai, pour vivre sa vie absurde  (tous les philosophes vivants ayant comme credo le non-sens, en y injectant, tant bien que mal, un sens) - en un siècle donc, qui se fout de la métaphysique comme d'une guigne, on est en droit et même en devoir de tenir pour suspect quelqu'un qui a un tel succès médiatique. Le succès médiatique, en effet, est bâti sur le bouche à oreille. Si les oreilles en question sont bien les nôtres, la bouche est presque toujours celle, monstrueuse et absolue de la télévision et de ses sectateurs fidèles : journalistes, chroniqueurs et queuses, et bouffons patentés, puisque, pour ses derniers, aucune émission dite "culturelle" ne peut plus s'en passer, syndrome kirkegaardien sans doute. La bouche télévisuelle parle vite, débite des informations au kilomètre, dans sa précipitation s'emballe, devient confuse, mélange tout, amalgame, et prend en haine la nuance, le détail. Les lèvres et la langue télévisuelles prennent pour un absolu ce qui est relatif et fait du relatif un absolu, nous imposant ainsi la pensée juste, le discours juste, les mots justes, l'attitude juste qu'il faut avoir pour être corrects dans cette société souffrant du manque de vérité. Et les émissions cultureuses sont les pires en ce domaine...
Onfray, donc, jouit, si l'on peut dire, car le pauvre homme, toujours habillé de noir, cheveux grisonnant mi-longs, et affichant sa philosophique moue, n'a pas l'air de jouir beaucoup, jouit peut-être alors, d'une réputation de philosophe inespéré, un nouveau Nietzsche, un oracle pour nos temps tempétueux, où l'Eglise Catholique, la fourbe, tente de reprendre du terrain, où la psychanalyse, la menteuse, étend encore son empire illusoire sur les âmes innocentes des quêteurs de vie .
Hélas, Michel, le chantre du prolétariat pensant, ne connait jamais très bien les sujets dont il parle. Déjà, son fumeux Traité d'athéologie, que l'on s'est disputé dans les maisons ouvrières, n'en doutons pas, était écrit à la truelle : une somme d'âneries, de citations hors contexte, d'approximations, de mensonges, le tout mêlé dans le fiel de la haine. La même recette pour le Crépuscule : Michel parle de Freud et de la psychanalyse, mais ne connait pas bien la seconde et dessine du premier un portrait largement déjà connu, mais Michel découvre Freud, et dans sa naïveté veut faire partager sa découverte aux ouvriers ses frères, car Michel écrit pour les ouvriers, oui-da, qui lui sauront gré de tant de sollicitude.
Avec son Apostille au crépuscule, où une psychanalyse post-freudienne est invoquée - elle existe déjà, Michel croit toujours être le premier en tout- les prolétaires - mais où sont-ils, enfin? je ne connais que les petits-bourgeois souvent prolétarisés certes, mais les prolétaires purs, cela n'existe plus - les prolétaires donc, doivent ici aussi se réjouir de ce nouvel ouvrage qui leur est spécialement destiné. "Apostille" voilà qui fait son prolétaire en plein ! Quelle riche idée pour un titre, Apostille, avec ça la ménagère court à Auchan acheter l'ouvrage, l'ouvrier ne tient plus en place, il lui faut cette "Apostille" ! Sérieusement, "Apostille"? Mais avec un tel terme, qui pèse son pesant de dandysme, l'ouvrage n'est pas destiné à d'autres qu'aux petits-bourgeois que nous sommes devenus tous. "Apostille" dit tout, et dénonce d'elle-même l'imposture, car Michel Onfray est un imposteur.
Et qui suis-je pour dire cela? Moi, qui n'ai reçu l'adoubement d'aucune télévision, qui ne suit pas chroniqueur chez Ruquier, qui ne suis pas bouffon chez Gisbert, hein? Et bien, en raison même de ma liberté de penser, et d'être libre en ma pensée. Alors je le redis, Michel Onfray est une imposture. Et à Caen, il y a mieux qu'Onfray : les tripes !

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